La Lecture Publique en Pays Morcenais : Un projet aux dimensions intercommunales valorisant la proximité
Dès la mise en place de l’établissement public de coopération intercommunale (EPCI) en 1994, la question de la création d’un établissement de lecture publique est portée par les élus communautaires. Le paysage des bibliothèques sur le territoire est alors très disparate, entre bibliothèque municipale avec un agent à temps partiel et des bibliothèques associatives, mais de toute façon largement insuffisant. Le cabinet d’étude ArtéSud est chargé de dresser le bilan de l’existant et de proposer plusieurs scénarios de modernisation.
Trois axes sont alors soumis aux élus communautaires. Le premier propose un fonctionnement et un investissement communal, le deuxième est une formule mixte dans laquelle l’investissement serait pris en charge par la communauté de communes et le fonctionnement par les communes ; enfin, le dernier scénario propose une solution entièrement communautaire. C’est ce dernier choix qui va être investi politiquement, car le projet de médiathèque va devenir un programme structurant de l’action communautaire, et l’organisation intercommunale va lui donner une dimension nouvelle.
Après avoir consulté les différents acteurs culturels et associatifs locaux, la communauté de communes, accompagnée et aidée par les différents acteurs institutionnels (direction régionale des affaires culturelles, médiathèque départementale de prêt des Landes, Pays Landes de Gascogne, Région Aquitaine), crée un réseau de quatre médiathèques entre 2000 et 2003. La médiathèque centrale est configurée pour satisfaire à elle seule à l’ensemble des besoins de la population, mais, pour répondre à la problématique de distance posée par la situation géographique, le réseau est complété par trois antennes situées dans les trois communes périphériques du territoire.
L’ensemble propose catalogue informatisé, carte d’usager et collection uniques, et tous les services et supports que l’on peut attendre d’une bibliothèque contemporaine. Ainsi, la médiathèque du Pays Morcenais est pensée comme une médiathèque de territoire, ses murs sont les limites géographiques de la communauté de communes. Plus que la simple addition de plusieurs établissements coopérant, c’est un tout proposant un service identique en n’importe quel point de son réseau. L’élan ainsi conféré au réseau lui permet de s’affranchir des contraintes des petites structures pour offrir des services plus ambitieux.
Professionnels et bénévoles
Le fonctionnement quotidien fait coexister une équipe professionnelle forte (6 ETP en 2022) et une équipe bénévole. La présence des bénévoles, héritée du fonctionnement des bibliothèques associatives ou municipales préexistantes, a été souhaitée dès le début du projet pour faire un lien entre territoire, population et établissements.
Dans un établissement plus important, au nom de l’indispensable et réelle technicité du métier, la cohabitation de personnel professionnel et de personnel bénévole aurait été plus complexe. Ici, le choix a été différent, et l’implication des bénévoles a tout de suite été valorisée. Comme le projet a permis la mise en place d’une équipe de professionnels conséquente, l’apport d’une équipe bénévole a été perçu comme une volonté de la population de s’investir directement dans la vie de l’établissement et non comme un palliatif à un manque de recrutement. Les bénévoles assurent l’ensemble des ouvertures aux publics des antennes du réseau, assurent seuls les prêts/retours et le rangement. De plus, ils participent à la réflexion sur les différentes animations culturelles et à leur réalisation, accompagnés par les professionnels. Pour cela, ils suivent une formation de base assez exigeante, puisqu’ils doivent être capables d’utiliser le logiciel documentaire, conseiller et diriger les usagers sur les informations de premier niveau ainsi qu’utiliser internet. Si les bibliothécaires professionnels, tous basés à la médiathèque centrale, veillent sur les collections, le temps dégagé par les tâches d’accueil réalisées par les bénévoles permet la mise en œuvre d’autres services.
Cependant, ces modalités atypiques, si elles imposent un management particulier, offrent à la médiathèque du Pays Morcenais un fort ancrage local et une latitude d’action qui lui permettent la mise en œuvre de services à l’image dans des établissements plus importants, et aussi de faire le choix de l’expérimentation. Cette volonté d’innovation s’intègre dans un contexte porteur, où l’ensemble des collectivités cherche à créer de nouvelles stratégies de développement. La commune de Morcenx-la-Nouvelle a ainsi mis en œuvre son propre réseau de fibre optique, fait remarquable pour une commune de 5 000 habitants. Plus de mille foyers ont ainsi accès au très haut débit, tout comme la médiathèque centrale.
Proposer, diversifier, expérimenter
Souhaitant « attiser » la philosophie du projet d’un réseau de lecture publique maillant le territoire, les élus communautaires ont voté la création du dernier échelon de l’ensemble avec la création systématique d’un relais dans les communes non encore desservies, pour que l’ensemble de la population accède au réseau sans avoir à se déplacer. Ce projet, conjointement réfléchi avec la médiathèque départementale de prêt des Landes, a abouti à la création des e-média. Porté à un échelon intercommunal, il a une nouvelle fois obtenu le soutien financier du conseil général des Landes et du Pays Landes de Gascogne.
Situés dans des locaux dédiés d’en moyenne 25 m², ces relais e-média ne proposent que très peu de documents, mais ils offrent un accès au catalogue ainsi que plusieurs accès gratuits à internet, et la possibilité de commander un document à distance et de se l’y faire livrer, s’il est disponible, dans un délai d’une semaine. Leur amplitude d’ouverture au public est de quatre heures par semaine, ouverture assurée par de nouveaux bénévoles recrutés et formés à cette occasion. L’évaluation de cette tentative de maillage total du territoire est mitigée : il ne semble pas opportun de créer un relais en deçà d’un certain seuil de population. Si une partie de ces équipements n’est pas pérennisée, l’ensemble des investissements réalisés pourra être absorbé par le réseau, permettant ainsi une expérimentation sans perte.